Czapek Antarctique Terre Adélie Secret Alloy: des reflets à couper le souffle
Courant 2020, les finances me le permettant et en pleine montée en gamme dans ma « collectionnite », j’ai eu dans l’idée de me payer une belle sport chic, les marques indépendantes faisant feu de tout bois pour nous proposer leur propre interprétation de ce type de montre…
Après avoir ouvert plusieurs sujets sur différents forums et beaucoup réfléchi, je suis tombé sur une vidéo d’un Youtubeur passant en revue une Czapek Antarctique Terre Adélie Secret Alloy. Comme dit l’adage, rien ne vaut l’expérience de voir le rendu d’une montre dans la vraie vie et notamment comment elle joue avec la lumière. C’était l’époque où Czapek avait lancé sa série de 99 pièces de souscription comme prologue à la collection Antarctique avec la Terre Adélie et son fameux cadran lamé main décliné en 4 coloris: bordeaux, bleu, noir et Secret Alloy. En l’occurrence, c’était cette dernière qui était illustrée dans la revue de la vidéo Youtube. Et je fus subjugué par la façon dont la montre captait la lumière et jouait avec elle. Je décidais alors de me renseigner auprès de Czapek. Et par chance, un client qui avait vu les premiers rendus du cadran guilloché « Stairway to Heaven » de la Passage de Drake avait décidé d’annuler sa commande d’une Terre Adélie Secret Alloy pour switcher sur la Drake. Je versais donc l’acompte pour attendre environ un an où la belle me serait livrée en mains propres à Genève, au show-room de la rue de la Corraterie.
Le 30 juin 2021, je pris donc mon train pour Genève et me retrouvais devant la boutique Czapek (après un contrôle douanier dont je me suis heureusement sorti, n’ayant rien au poignet). Accueil royal par Messieurs de Roquemaurel et Millasson (suivi d’un déjeuner), échange de souvenirs où j’avais rencontré le grand patron à la dernière édition du Salon Belles Montres à Paris où Czapek signait son retour, découverte de mon nouveau jouet et mise à taille du bracelet et du rubber, j’étais aux anges !
La pièce, comme toute montre, était encore plus captivante en vrai que sur la vidéo ou n’importe quelle photo. Un immense confort de porté, la pièce étant très légère (et encore plus sur un rubber). Un diamètre contemporain de 40.5mm (l’Antarctique est aussi disponible en 38.5 mm). Une épaisseur contenue de 10.6mm (mais surtout due à son saphir légèrement cheminée, la carrure de la boîte elle-même étant très fine). Une couronne vissée garantissant une étanchéité de 120m. Un système « quick change » permettant d’alterner rapidement avec un cuir ou un rubber. Un cadran conçu par Metalem (le cadranier de Philippe Dufour, excusez du peu !), lamé main (d’où ses très fines stries), obtenu à partir de ce savant mélange d’or, d’argent, de platine et de palladium aux reflets à couper le souffle, passant du champagne à un léger tabac, associé à des index facettés à la perfection accentuant les jeux de lumière. Et un mouvement SXH5 designé maison par Czapek et conçu par Chronode, mettant en valeur ses ponts ajourés à 6 angles rentrants, ses chanfreins main, son micro-rotor en platine recyclé et son sablage sombre associé à des rouages en or pour une esthétique à mi-chemin entre hommage aux calibres de ces goussets chers à François Czapek et quelque chose de plus futuriste, une sorte de savant cocktail néo-rétro. L’avantage du SXH5 de la Terre Adélie, c’était aussi sa certification « Chronomètre » par Time Lab, l’Observatoire de Genève, et ce, de série. La certification « Chronomètre » des Czapek peut toujours se faire sur simple demande en amont de leur conception, mais en échange d’un petit chèque en plus…
Ce qui m’impressionne d’ailleurs avec ce calibre est l’absence d’erreurs de jeunesse dans son processus de fiabilisation. 4 ans après mon acquisition, tout simplement RAS ! La tenue de l’heure est tout bonnement excellente, la dérive étant quasi-indolore. La réserve de marche de 60h est tenue ! On est donc sur une maîtrise technique qui a été savamment pensée dès l’origine et qui est très poussée, avec une vraie volonté de construire quelque chose de robuste dès l’origine. Un autre effet « kiss-cool » : chaque fois que la montre passe en SAV, la marque en profite pour mettre à jour son mouvement et le faire évoluer vers la dernière mouture en catalogue ! D’ailleurs, si vous suivez Monsieur de Roquemaurel sur Instagram (@czapek_in_my_eyes), vous vous rendrez compte qu’il est un snowboarder assez chevronné qui n’hésite pas à tester la résistance de ses montres sur les pistes de la région des Dents du Midi et du Mur Suisse, un peu à la manière de ce que font les amis de Richard Mille ! Le bracelet, quant à lui, a pu être contesté tantôt pour le petit jeu au niveau de sa chute que pour son ressenti un peu rugueux au touché en raison de l’articulation des maillons en forme de « C »… Critiques entendues par la marque qui l’a fait évoluer vers une meilleure intégration avec un nouvel end-link et qui a de surcroît proposé un micro-ajustement astucieux et coulissant à l’aide de petits poussoirs de part et d’autre du fermoir. Autrement, le bracelet procure des jeux de lumière assez saisissants qui rappellent ceux d’une Royal Oak. Les maillons centraux articulés en forme de « C » sont polis (mais il est possible de les faire brosser sur demande), le reste du bracelet étant brossé vertical.
La finition globale est donc très bonne, me faisant dire que les reproches lui étant adressés sont plus liés à sa conception qu’à sa finition à proprement parler. Personnellement, je le garde tel quel et ne souhaite pas le faire évoluer pour des raisons bien précises. Ma pièce est la toute première Antarctique, celle de la série de souscription initiale. Il me paraît donc important de la garder dans sa configuration d’origine car je suis persuadé qu’avec le temps, ces petits défauts de conception pourront devenir des qualités et que l’on appréciera de retrouver dans une dizaine d’années une Antarctique initiale dans son jus, s’étant bonifiée comme un grand cru, avec ses petites failles de jeunesse comme ses immenses qualités…
Un défaut tout de même mais plus relatif à Czapek en général qu’à l’Antarctique: je trouve qu’avec une production actuelle de près de 1000 montres à l’année, c’est presque trop et la cote s’en ressent, ayant fait une courbe en cloche. Ils devraient maintenir une production limitée, surtout de l’Antarctique, pour préserver son caractère désirable et tenter de figer dans le temps une demande plus forte que l’offre. Ce qui est rare est d’autant plus convoité et suscite les fantasmes, le rêve. Quand Czapek a dû fermer les listes de l’Antarctique pour excès de demande, ils produisaient bien moins, même si l’on était en période Covid et que l’industrie tournait au ralenti. Des articles de presse spécialisée étaient parus se demandant, au plus fort de la vague d’enthousiasme pour l’Antarctique, si cette dernière était la nouvelle 5711… D’après moi, en ayant répondu favorablement à la demande en rouvrant les listes, en faisant toutes sortes de séries limitées et en augmentant la production, Czapek a pris un petit risque même si bien sûr, la production reste faible, on n’est pas dans une production de Haute Horlogerie presque à la chaîne comme ce qui se fait pour le Big 3 Patek/Audemars/Vacheron. Produire peu aurait permis de préserver le rêve, la cote et de s’assurer d’un flux de demandes sans doute assez constant, même si elles auraient probablement été plus longues à honorer (et qui s’en plaint, c’est même la marque des plus grands de se targuer d’avoir des listes sur plusieurs années, c’est d’ailleurs ce qui se passe chez Grönefeld, Voutilainen ou les frères Rexhepi dont le prestige n’est plus à démontrer et les clients patientent car ils veulent vraiment leurs montres !). Le secteur du luxe et de l’horlogerie artisanale de prestige doit jouer la carte de l’exclusivité sur laquelle ils se différencient des produits de masse ! Il faut donc d’après moi faire attention à ne pas se « banaliser » !
Vous l’aurez donc compris, je suis un très grand ami de Czapek. Etant un très grand Patekophile, avec néanmoins des objections fondées liées à la sortie de la Cubitus (plus liées au positionnement prix et aux multiples erreurs de communication qu’au produit en lui-même qui ne mérite pas vraiment une telle haine, surtout après l’avoir passée au poignet) et des critiques sur la politique de prix de la marque à la Croix de Calatrava, l’Antarctique, sous toutes ses déclinaisons, en raison du blason qu’elle porte, parvient en quelque sorte aujourd’hui à remplir le vide laissé par une vraie sportive réussie à la Croix de Calatrava. En effet, Czapek, en raison de l’histoire de son nom, garde malgré tout un petit lien avec Patek, bien que les deux marques soient indépendantes l’une de l’autre. On pourrait alors se prendre à rêver que Czapek développe et vende une itération du SXH5 à Patek pour une prochaine sortie (par exemple, pour une réédition de la Nautilus 3700 avec les 50 ans de l’illustre sportive qui approchent ?!) ressuscitant par là-même une collaboration d’exception ayant marqué à jamais l’histoire de l’horlogerie. Mais Thierry Stern, muré dans sa tour d’ivoire avec son ego et insensible à toute suggestion qui pourrait faire plaisir aux fans, en aurait-il seulement l’idée ?! J’en doute fort !